Bien le bonjour, j'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous.
Alors, la bonne nouvelle, c'est que je vais enfin mettre Eros et Thanatos en ligne (là, maintenant, tout de suite).
La mauvaise… Ben c'est que je devrai le retirer le 14 juillet. Que je vous explique ! Je l'ai envoyé au concours tremplin Black Moon. Malheureusement, si je veux que ma participation soit validée, je dois enlever le texte durant la durée du concours. C'est pour cela qu'Eros et Thanatos sera retiré à partir de ce moment-là. Si cela peut vous rassurer, je le mettrai de nouveau en ligne si je ne fais pas partie des lauréates du concours (ce que nous saurons à la rentrée prochaine).
En attendant, vous retrouvez l'intégralité des chapitres dans l'onglet “Vous lisez”.
Ah, et pour ceux qui ne me connaissent pas bien, ne vous étonnez pas du texte de départ avec HONEDA, il s'agit de mon narrateur personnel, qui apparaît aussi dans mes histoires sous forme de ville ou de village. J'ai l'habitude de le présenter à chaque début de roman, une sorte de signature, en réalité.
Maintenant, place à l'histoire !
Eros et Thanatos
Auteur : Marine Lafontaine
Disclamer : tous les personnages, ainsi que l'univers dans lequel ils évoluent, sont le fruit de mon imagination.
HONEDA
Je ne suis ni un homme, ni une femme. Je ne
suis ni noir, ni blanc, ni asiatique, ni d’une quelconque couleur de peau. Je
ne suis ni objectif, ni subjectif. Je suis tout, mais rien. On me nomme HO-
pour mon hospitalité : qu’importe la raison, vous serez toujours les
bienvenus entre mes pages. On ne nomme N- pour ma nature. On me nomme E- pour
les émotions que je suscite avec cette voix ni belle, ni laide. On me nomme DA-
pour dactylo, pour transcrire et transmettre mes histoires ni ennuyeuses, ni
intéressantes.
Je suis HONEDA et je suis un narrateur.
Ceci est l’histoire de trois garçons et
trois filles. Six êtres qui vont apprendre à s’apprivoiser, à se connaître, à
s’entendre, à s’aimer, à se consumer, couchés parmi les cendres, encerclés
d’ombres, enveloppés de la bise glaciale de la mort.
Est-ce que l’amour est capable de
résister à de terribles épreuves ?
« Il arrive que certains d’entre
nous naissent avec des pouvoirs équivalents à ceux des Dieux. Malheureusement,
je fais partie de ceux-là. Mais il existe ici-bas des personnes comme toi qui
acceptent tout, même le pire. » Cinaed.
« T’aimer, ou comment éprouver de
l’affection pour la faucheuse. » Gabrielle.
« Je crois qu’il faut avoir un petit
pois dans la tête pour vouloir vivre à tes côtés… Ou être super, mais
alors hyper tolérant ! T’aimer, c’est comme dévisser une ampoule sans
avoir coupé le courant et j’adore ça. » Ael.
« Je suis tes yeux, tu es mes
oreilles, je t’aime. » Nathanaël.
« Qui aurait pu croire que je
tomberais amoureuse de la personne la plus grossière sur cette
Terre ? Néanmoins, merci d’être comme tu es, c’est ce qui fait que tu
es celle que tu dois être.» Lizzie.
« J’étais folle, toi aussi, j’étais
morte de peur, toi de même, puis
je t’ai rencontré. » Azela.
« Vivamus,
mea Lesbia, atque amemus » Catulle
Scène de piété filiale
Scène de piété filiale
L’éclat accrochait les rayons du soleil et les
réverbérait. Ils semblaient glisser le long du fil de lame pour aller ensuite
ricocher dans son œil.
Une vie de tournesol… Toujours à la recherche de
lumière, le corps si vite fané une fois qu’on l’a arraché de terre.
Que voulez-vous dire ? Une fois cueilli… c’est ça ?
Les gouttes vermeilles se mêlaient aux
rayons pour se fondre les uns dans les autres, comme des amants qui
s’enlaçaient. Beau et repoussant à la fois …
Tu as fait le bon choix, Nathanaël. Il n’y a pas de problème. Il fallait le faire…
Non, non… Je ne pense pas.
Nous sommes là, nous. Tu n’as pas à t’en faire.
Pupilles dilatées, mains tremblantes, corps secoué
de frissons malsains. Nathanaël leva lentement la tête vers le ciel paisible.
Pourquoi m’avoir fait faire ça, une
nouvelle fois ?
Il le fallait.
Mais…
-
Nathanaël !
Un cri strident et aigu. Une voix familière. Elle
aurait dû évoquer de tendres souvenirs au parfum de lait et d’étreinte.
Mais elle n’éveilla en le jeune homme que
des regards terrifiés. Il pensait pourtant les avoir enfermés à double tour
dans un coin de son esprit… Pourquoi revenaient-ils maintenant ?
Elle ne comprend pas, Nathanaël, laisse-la donc.
Elle n’est rien.
Il ne leur répondit pas, fixant la femme horrifiée
de ses yeux gris aux reflets d’orage. Elle tremblait, son corps était secoué de
spasmes, elle se retenait mal de vomir. Sa peau était recouverte d’une
pellicule de sueur. Une sueur froide… provoquée par la peur. Il voulut
l’approcher, mais elle hurla. Tout en poussant ce cri abominable, elle
reculait, se cognant à la table de la terrasse. Elle faillit tomber, mais se
rattrapa à une chaise.
-
Ne
m’approche pas ! Ne m’approche pas, espèce de monstre !
Abomination !
-
Mais…
-
AAAAAH !
Elle continuait de crier, vrillant les
tympans de Nathanaël de sa voix perçante. Elle avait une sorte de bracelet
à son poignet dont elle avait enclenché le bouton. Dans le lointain, des
sirènes se mirent à mugir. A ce son, la femme retrouva un semblant de courage,
assez pour cracher à la figure du garçon. Ce dernier ne broncha pas. Ses doigts
recueillirent la salive sur sa joue.
Tu devrais la tuer, elle aussi,
Nathanaël ! Avant qu’elle ne te renie complètement…
Puis ils débarquèrent. Toutes ces mains
qui l’agrippent et le secouent… On le jeta à terre et on lui passa les
menottes. Les policiers beuglaient des choses, mais Nathanaël ne les entendait
pas. Ses oreilles bourdonnaient et sa vision était floue. Il eut un regard pour
le couteau qui traînait dans le gazon, souillant les brins d’herbe d’un rouge
vermeille. Son père adorait son jardin. Il en avait toujours pris soin, avec
une attention et une tendresse toute particulières. Tout comme il s’était
toujours occupé de son fils. Et lui avait toujours énormément aimé cet homme
compréhensif et généreux.
C’était d’ailleurs lui, aujourd’hui, sa
nouvelle victime.
-
Nathanaël… Tu
as quel âge déjà, mon garçon ?
-
J’ai seize
ans, monsieur.
-
Seize
ans… Je ne pensais pas te voir encore ici.
Tue-le, tue-le !
Nathaël les ignora, se concentrant sur
l’homme qui lui faisait face. Il s’agissait de son avocat, le même, toujours.
Celui qui le suivait depuis tout ce temps. Un homme sec comme une vieille
branche, aux mains noueuses. Il était assis de l’autre côté d’une vitre de
protection en verre renforcé de barreaux en acier. Nathanaël se tortilla sur sa
chaise en plastique, mal à l’aise. Les murs suintaient d’humidité et une sorte
mousse grisâtre courrait sur les cloisons de plâtre.
Tue-le, tue-le, tue-le, tue-le, tue-le, tue-le,
tue-le, tue-le, tue-le, tue-le, tue-le, tue-le, tue-le ! TUE-LE !
Nathanaël étouffa à grand-peine un gémissement. Il
avait l’impression qu’on broyait ses tempes entre deux pierres. Il ressentait
des picotements dans ses avant-bras et ses poignets le torturaient. Quand il
les fit tourner, l’os craqua. Il remarqua avec horreur que ses doigts étaient
recourbés comme des serres. Ou plutôt…
Comme lorsque j’ai étranglé Ael…
Oui, exactement. Refais-le !
Pourquoi ?
Parce qu’il le faut. Sinon, tu sais bien ce qui va
se passer ! Tu tiens vraiment à vivre ça, Nathanaël ? Tu tiens
vraiment à ce qu’ils…
L’intéressé leva lentement sa main vers
les barreaux. Mais, au dernier moment, il fit semblant de toucher une tâche sur
la vitre de protection. L’avocat n’avait pas reculé. Il planta ses yeux bleus
dans ceux de son client.
-
Jusque-là,
j’ai tout fait pour te sauver, Nathanaël, mais… Cette fois-ci, je
n’arriverai pas à t’en sortir. Plaide coupable. C’est tout ce que je peux te
conseiller…
-
Je sais,
monsieur, murmura le garçon en baissant la tête.
-
J’aurais
vraiment aimé t’aider, mais là… Je ne peux rien faire.
Nathanaël ne pleura pas. Cela faisait des années
qu’il avait cessé de verser des larmes. Il savait ce qui l’attendait. Il vit
l’avocat se lever et fit de même, précipitamment.
-
Excusez-moi !
appela-t-il.
L’interpellé s’arrêta.
-
Est-ce
que… Est-ce que ma mère va venir ? demanda timidement le jeune homme.
L’avocat posa sur son client un regard empli de
tristesse. Le meurtrier se rassit sur sa chaise, sachant parfaitement ce que ça
voulait dire.
-
Au revoir,
mon garçon.
Nathanaël fut reconduit à sa cellule sous bonne escorte.
Il était pieds et poings menottés. Sa geôle en voisinait d’autres, mais toutes
étaient vides.
Tant mieux. Il ne faut pas m’approcher, je suis
dangereux.
Mais non, tu n’es pas dangereux. C’est eux qui sont
stupides. Pourtant, c’est bien que nous soyons seuls, non ? Comme ça nous
ne serons pas dérangés.
Le meurtrier s’assit sur sa couchette. La
même, toujours. Celle sur laquelle il avait dormi la dernière fois, mais aussi
la fois d’avant, et celle qui précédait celle d’avant. Il ne ferma pas les yeux.
Il préférait ne pas dormir. Sinon, ils les reverraient.
Les visages de ceux qu’il avait
tués.
-
Fallait-il
vraiment que je le fasse ? demanda-t-il dans le vide sur un ton étouffé.
Evidemment ! Il le fallait ! C’est bien mieux ainsi, tu ne crois pas ?
-
Je… Je
ne sais pas…
Nous sommes là pour toi, ne te préoccupe de rien
d’autre.
-
Mais… Mon
père…
Tout va bien, Nathanaël. Quoiqu’il
arrive, nous serons toujours là, à tes côtés. Nous, nous serons
là… toujours…
-
Le pire,
c’est que je sais que c’est vrai…
Ael observa un moment la silhouette de Nathanaël
qui dormait sur sa couchette, recroquevillé comme un petit animal.
Machinalement, il porta deux doigts à sa gorge pour retracer les marques que
lui avait laissées son ami le jour où il avait tenté de l’étrangler. A ce
moment-là, si… Il préférait ne pas y penser.
-
Chéri, je
ne sais pas si c’est une bonne idée de venir, tenta de le retenir sa mère,
jetant des regards apeurés vers la cellule. Il est fou à lier.
Ael lui offrit un sourire rassurant et frappa contre
la vitre pare-balles qui le séparait de Nathanaël. Ce dernier sursauta, tiré
brusquement de son semi-sommeil. Il posa un regard surpris sur Ael, regard qui
vira à la panique.
-
Tu ne
devrais pas être là, lui murmura-t-il précipitamment. Tu dois t’en aller !
C’est lui, Nathanaël, tue-le ! Tue-le, voyons !
Ael, inconscient du risque auquel il
s’exposait, sourit tristement.
-
J’ai appris
la mort de ton père…
-
Je… Oui…
Le garçon baissa la tête, honteux. Ael voulut
ouvrir la bouche, mais sa mère le tira en arrière sans ménagement.
-
Arrête de
parler à ce monstre ! lui cria-t-elle. C’est un malade mental, il a déjà
essayé de te tuer, je ne veux pas que ça se reproduise !
-
Mais,
maman…
-
On s’en
va !
Mais son fils se dégagea de son emprise.
Les mots résonnaient dans sa tête : monstre, malade mental… Il savait
que Nathanaël n’était pas comme ça. Il alla s’accroupir près de son ami. Ce
dernier semblait au bord de la nausée.
Qu’attends-tu pour le tuer, voyons ? Il faut que tu le fasses, n’attends pas !
Je ne veux pas… Je…
Fais-nous confiance, Nathanaël. C’est ce qu’il y a
de mieux.
-
Va-t-en,
supplia le meurtrier en reculant. Tu sais pourtant de quoi je suis capable.
-
C’est
d’ailleurs pour cette raison que je viens te voir, lui sourit Ael. Je suis ton
meilleur ami, Nathanaël, ne l’oublie pas.
Il vit le visage de son ami se chiffonner de
tristesse. Il voulut parler, mais aucun son ne sortit de sa gorge. Ael se
redressa.
-
Je serai
là, le jour du procès. Je serai là.
Cinaed poussa un grognement de
frustration. Il prit une nouvelle cigarette dans son paquet et la porta à sa
bouche. Sans rien sortir, que ce soit briquet ou allumette, le bout de sa
nicotine en barre se mit à rougir et à grésiller. Il en prit une bouffée,
espérant ainsi calmer la nervosité qui le rongeait. Cela faisait un quart
d’heure qu’il faisait le pied de grue près du poste de police. Il savait qu’il
ne pouvait intervenir, et cette idée le ravageait. Il aurait tellement aimé y
aller et ainsi pouvoir…
La porte du poste s’ouvrit soudainement
sur Ael et sa mère. Un soupir de soulagement passa les lèvres entrouvertes de
Cinaed. Quand il avait appris qu’ils allaient au poste voir l’autre fou qui
faisait office de meilleur ami au jeune homme, il avait paniqué. Il n’avait pas
envie d’user de nouveau de ses pouvoirs devant Ael… Même si ce dernier
ignorait qui il était en réalité. Il le fixa, remontant la rue tout en tentant
de calmer sa mère hystérique. Il dut sentir qu’on l’observait car il se
retourna soudainement. Cinaed croisa ses yeux bleus, trop bleus pour être
réels. Cinaed se demanda un court instant s’il portait des lentilles ou si
cette couleur extraordinaire était la sienne… quand il reçut un coup de
coude dans le ventre !
-
Tu pourrais
écouter quand je te parle ! signala une voix féminine avec mauvaise
humeur. Déjà que ça fait trois plombes que tu t’es arrêté et… Hé, Cinaed,
tu m’écoutes, oui ?
-
Oui, oui,
soupira celui-ci. Qu’est-ce qu’il y a, Gabrielle ?
Sa sœur jumelle lui lança un regard courroucé. Si
ces deux-là n’avaient pas vraiment le même physique, ils possédaient la même
personnalité, ainsi que les mêmes goûts. Ils étaient d’ailleurs souvent
ensemble, quand chacun ne partait pas de son côté s’amuser avec ses amis. Ils
pouvaient s’entendre à merveille pendant une journée complète, puis, sans
prévenir, devenir les pires ennemis au monde.
Gabrielle plissa les yeux. Elle s’était
récemment acheté des lentilles de couleur sépia qu’elle adorait. Elle scruta la
rue d’un air concentré, puis un sourire vint trancher sa frimousse couverte de
tâches de rousseurs.
-
Alors
quelle fille étais-tu en train de mater ?
-
Aucune.
-
Un garçon
alors ?
-
Non
plus !
-
Hum…
Elle eut une moue ennuyée, tout en se grattant
l’arrière du crâne. Ses cheveux roux coupés à la garçonne lui procuraient un
air espiègle. Elle donna un petit coup de poing dans l’épaule de son frère et
glissa son bras au creux de son coude.
-
Allez
viens ! On va se boire quelque chose ?
-
Non, j’ai
pas vraiment envie, ce soir.
-
Très
bien ! Alors, on rentre !
Ael fixait d’un air absent les gyrophares des
voitures de police qui déchiraient la nuit. Le procès de son ami était pour le
lendemain. Sa mère était allée voir celle de Nathanaël pour la calmer et la
soutenir. Il savait qu’elles allaient toutes deux déverser leur bile sur le
jeune meurtrier, et cette pensée le révoltait. Bien qu’il ait tenté de le tuer
par le passé, jamais Ael n’avait réussi à lui en vouloir.
Il avait l’impression que son ami
entendait certaines choses. Des choses que lui et les autres ne parvenaient à
percevoir. Il aurait donné cher pour savoir ce que c’était. Il aurait aimé
aider Nathanaël et ainsi empêcher ce qui allait arriver le lendemain même.
Parce qu’il connaissait déjà la décision du juge, chacun la savait…
Ael tira les rideaux pour ne plus voir
les lumières colorées et se laissa tomber sur sa chaise de bureau. Il n’avait
pas la tête à ses devoirs… Il se mit à jouer avec son stylo plume sans
réellement y faire attention. Aujourd’hui encore, il l’avait
croisé… Cinaed Helldi. Ce gars-là était dans le même lycée que lui. Connu
pour son côté impulsif, il jouait facilement des poings, mais semblait pourtant
bon élève. Il avait un succès fou avec les filles. Il fallait dire que c’était
un “morceau de choix”. Son côté mauvais garçon séduisait, mais il avait
également un physique avantageux, sculpté par le sport Mais on ne lui avait
jamais connu de petites amies. Comment Ael savait-il tout ça ? Parce que
c’était un des élèves les plus populaires du lycée et que, dans ces cas-là, les
rumeurs allaient vite. Sa sœur jumelle, Gabrielle Helldi, était également
connue pour son côté garçon manqué. Ael avait longuement sympathisé avec elle
cette année. C’était une fille plutôt mignonne et extravertie.
Le garçon soupira et reposa son stylo.
Demain soir, à dix-sept heures, le procès… Dans trois jours, l’enterrement
de Monsieur Ouïmo, le père de Nathanaël.
Et dans une semaine, tout au plus, il
n’aurait sûrement plus jamais l’occasion de voir son ami.
Gabrielle et son frère se trouvaient dans
la salle de bain, chacun vêtu d’un tee-shirt noir, de jeans délavés et troués,
chaussés de baskets colorées. La jeune fille souligna son regard d’un coup de
crayon alors que son frère tentait d’aplatir un épi.
-
T’es au
courant ? lui lança sa sœur. Apparemment, c’est aujourd’hui, le procès du
copain d’Ael.
-
Je sais,
marmonna Cinaed. Ah, saleté d’épi !
-
Passe-moi
ta laque, je vais arranger ça.
Il la lui donna et elle se mit derrière lui pour
tenter de discipliner la chevelure blonde de son jumeau. Elle reprit :
-
Ça fait
deux jours qu’il est en prison. Il aurait tué son père, cette fois-ci.
-
…
-
Dire que
c’était le meilleur ami d’Ael… Il doit être rudement secoué.
-
Hum…
-
Voilà !
C’est arrangé !
Elle ébouriffa ses cheveux roux qu’elle
aspergea ensuite de laque. Satisfaite, elle rendit le tube à son frère qui,
lui, était en train se brosser les dents. Il grogna un remerciement.
-
Je crois
que c’est son deuxième meurtre, murmura-t-elle.
Cinaed cracha dans le lavabo.
-
Deuxième ?!
s’étrangla-t-il. Mais il n’a que seize ans !
-
Ael n’aime
pas en parler, c’est par les journaux que je le sais. Il aurait tué sa propre
sœur, il y a quelques années, mais il n’y a jamais eu de preuves formelles.
-
Mais il est
taré ! Pourquoi ne l’ont-ils pas coffré depuis tout ce temps ?
-
Je suppose
qu’il était trop jeune, qu’ils ont jugé qu’il valait mieux l’assigner à
résidence… Je ne sais pas. Il y a une rumeur disant que c’était parce
qu’ils le trouvaient mentalement instable… Je trouve ça triste…
-
Moi je dis
surtout que c’est un fou dangereux !
Elle eut un petit sourire amer, puis passa au pouce
son anneau en fer où étaient écrits en noir “live” et “death”. Son frère avait
le même, mais avec l’inscription “FIRE”. Au sommet de son oreille droite se
déployait une sorte de griffe, agrémentée d’une pierre rouge. L’oreille gauche
de sa sœur était également percée et elle y accrochait toutes sortes de boucles
d’oreilles fantaisies. Aujourd’hui, elle en avait choisi une composée de trois
chaînes où pendaient des plumes blanches qui coulaient sur son épaule.
-
Bon,
sourit-elle. On essaie d’entrer au lycée sans se faire virer dès la première
heure ?
-
C’est une
option, ricana son frère.
-
Prends tes
études au sérieux !
-
Oui,
chef !
Elle poussa un soupir et attrapa le sac en toile
qui lui faisait office de cartable.
-
Go !
Une ambiance lourde régnait au petit-déjeuner, ce
matin-là. Ael triturait ses céréales sans réelle envie de les porter à sa
bouche. Ses parents lui jetaient des regards en coin quand ils pensaient qu’il
ne s’en rendait pas compte. Sa mère finit par se racler la gorge et posa sa
main sur son poignet :
-
Ael, chéri,
dis-moi… Tu n’envisages pas d’aller au procès de ce garçon
aujourd’hui ?
-
Il
s’appelle Nathanaël, maman.
Il la vit se raidir. Ce prénom était tabou ici
depuis qu’il avait failli mourir de ses mains. Mais Ael n’hésitait pas à le
prononcer. Ce n’était qu’un prénom, après tout ! Pas de quoi en faire une
crise cardiaque !
Sa mère ravala difficilement ses larmes
et il sentit son cœur se serrer. Il n’aimait pas la voir souffrir. Il savait à
quel point elle tenait à lui, sa réaction vis-à-vis de Nathanaël était normale.
Malgré tout, il ne supportait pas quand elle parlait de lui comme s’il s’était
agi d’un monstre…
Ce que tous pensaient.
-
Maman, lui
sourit-il doucement en pressant sa main dans la sienne. Je veux y
aller… Tu comprends ?
-
Mais, Ael,
il a tenté de te tuer ! explosa son père.
Le garçon ne répondit pas. Il se souvenait de
chaque détail de ce jour, comme si tout s’était passé la veille. Les doigts de
Nathanaël sur sa gorge, le manque d’air, la tête qui lui tournait, leurs larmes
à tous deux qui coulaient, puis cette explosion… Ces flammes, des bras qui
l’arrachaient de l’étreinte mortelle de son ami, une voix dont il ne se
rappelait ni le timbre, ni les mots… Juste la chaleur que cela lui avait
procuré…
Il fut arraché de ses pensées par les
sanglots de sa mère. Il se leva pour entourer ses frêles épaules de ses bras.
Il se haïssait de la faire pleurer, de lui causer du mal, mais il devait y
aller…
-
Ne t’en
fais pas, la berça-t-il. Tout ira bien, Nathanaël ne m’approchera pas.
-
Je ne
t’empêcherai pas d’y aller, mon poussin, lui confia sa mère, mais… Si tu
savais comme ça me fait peur.
-
Maman…
-
Vas-y avec
quelqu’un, alors ! le pria son père avec inquiétude. Ne te retrouve pas
seul avec lui !
-
Mais,
papa…
-
Je veux que
quelqu’un soit avec toi ! Moi… c’est au-dessus de mes forces.
-
D’accord,
je demanderai à un de mes amis.
-
Merci.
Ael sentit une bouffée d’amour monter en lui. Il se
dit qu’il avait vraiment des parents forts et compréhensifs. Il les embrassa,
attrapa son sac et fila en cours.
2 commentaires:
Comme d'hab', incapacité totale de ma part à interrompre ma lecture, même pour deux secondes !! J'aime beaucoup ^^ toujours les mêmes prénoms dis donc, que de marques de fabrique ! change un peu de temps en temps :p
Au moment ou Ael parle de Gabrielle : "plutôt mignonne et extravertis" plutôt que le contraire. Sinon c'est parfais, comme d'habitude de toute manière ;)
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