samedi 16 juin 2018

BENDY AND BORIS, CHAPITRE 29

Bien le bonjour, tout le monde !

Rien à vous signaler de particulier avec ce chapitre, alors je n'ai plus qu'à vous souhaiter à tous une très bonne lecture !





Figaro, d’aussi loin qu’il s’en souvienne, avait toujours connu la sécurité des bras de sa gentille maîtresse Minnie. Ce délicat chaton n’était pas sujet à la prudence. Pourquoi l’aurait-il, après tout, lui qui avait grandi dans un environnement serein et délicieusement doux ?
Ainsi, quand le surnommé Jackpot quitta la grotte pour explorer les abords de l’océan, il ne prêta pas le moins du monde attention à la sirène carnassière qui se trouvait juste à quelques pas de lui, complètement absorbé par son exploration des fragrances apportées par l’air iodé. C’est à peine, d’ailleurs, s’il réagit quand la main gigantesque du monstre s’approcha de lui dans l’intention de le saisir entre ses doigts calleux. Ce ne fut que lorsque son nouvel ami hurla son nom qu’il consentit à s’arracher à ses recherches olfactives.
Cuphead, en effet, à la vue de la menace imminente, bondit à découvert sans même réfléchir. Il saisit la pierre la plus proche qu’il balança contre la main de la sirène tout en hurlant le prénom du petit animal. Quand les yeux du félin se posèrent sur lui, il lui fit signe d’approcher tout en continuant à l’appeler d’une voix tremblante d’anxiété :
-       Viens là, p’tit gars !


Le chat poussa un miaulement plaintif et se précipita dans le refuge des bras du nervi du Diable en quelques bonds. Celui-ci le serra contre son cœur, soulagé à en crever. Cependant, le calme fut de courte durée. Furieuse que son amuse-gueule lui ait filé entre les doigts, la sirène poussa un rugissement inhumain et bondit en avant, le visage transfiguré par la haine et la faim.


Tétanisé, Cuphead ne put qu’observer la mort approcher. Heureusement pour lui, Félix n’était pas du genre à fuir devant la peur. Au contraire, l’écrivain adorait singulièrement se jeter face au danger. C’est pourquoi il bondit avec l’agilité d’un guépard, son sabre à la main. Sa lame trouva la chair de leur ennemie dans une épaisse et chaude gerbe de sang noir.
L’écrivain voulut reculer, mais son adversaire ne lui en laissa pas le temps. Un tentacule de la pieuvre située sur le sommet du crâne de la sirène claqua soudain dans l’atmosphère et vint s’enrouler autour de la taille du chat pour le soulever dans les airs. Cependant, l’aventurier n’était pas seul. Lorsqu’il avait vu son idole se jeter dans la bataille, le sang de Bendy n’avait fait qu’un tour. Il avait soulevé le plus gros rocher qu’il avait pu trouver et l’avait lancé de toutes ses forces. Son projectile se fracassa contre la joue de leur ennemie qui hurla à la mort. Mugman se jeta à son tour dans la mêlée. Il bondit et tira sans même prendre la peine de viser.  
-       Recule, monstre ! ordonna-t-il avant de lancer une seconde salve.


Boris, qui était demeuré à l’abri dans la pénombre de la grotte, se redressa violemment à la vue de son ami en première ligne.
-       Mugs ! Fait attention ! cria-t-il.
La main gauche de la sirène avait été gravement endommagée les attaques combinées du frère de Cuphead et de l’aventurier. Les fissures craquelèrent et devinrent béances. La chair, comme s’il s’agissait de roche, se brisa et les phalanges ainsi que la paume s’écroulèrent sur eux-même avant de disparaître dans le ventre avide de l’océan. Boris porta une main horrifiée à sa bouche. Mon dieu, mais quel était ce cauchemar… ?
L’entièreté de l’attention de l’apprenti mécanicien était portée sur le combat qui se déroulait à quelques pas d’eux, si bien qu’il ne remarqua pas son aîné à la démarche vacillante. Bendy, avec horreur, venait de se heurter à une paroi de la caverne, le souffle court. Il porta une main à son front où commençait à pulser l’insidieuse chaleur douloureuse. Quand il retira ses doigts, il constata qu’un filet d’encre imprégnait sa paume. Non… Non, non, pas maintenant !
Comme si l’Inkness allait écouter ses suppliques.
Un voile de brouillard s’abattit sur son regard alors que la fièvre prenait possession de ses membres gourds ; c’était à peine s’il parvenait à les mouvoir. Le goût si haï de l’encre avait envahi son palet. Le mécanicien tentait tant bien que mal de lutter contre les vertiges qui l’assaillaient, mais il ne parvenait même pas à décoller son dos de la paroi de pierre. Non, non, non… Il ne pouvait pas faire une crise, pas maintenant, pas alors que tous risquaient leur vie. Il voulait aider ! Il ne pouvait laisser cette affreuse sirène les blesser. Son frère, ses amis, son idole… 
Il devait les protéger ! Il le… devait…



Le malade se recroquevilla sur lui-même, masse pathétique de chair prise de convulsion. L’encre le recouvrait presque entièrement d’un linceul noir et gluant. Boris finit par le remarquer et il comprit instantanément de quoi il en retournait. Il se précipita vers son aîné, l’estomac broyé par l’inquiétude.
-       Bendy ? Tu vas bien ?
Le louveteau avança sa main, mais retint son geste juste avant que ses doigts n’entrent en contact avec la peau de son frère. Ce dernier venait de brusquement se redresser et de se tourner vers lui. Boris recula d’un pas, la gorge broyée par une vague de terreur. Qu’est-ce que… ? Il tenta d’appeler le mécanicien, mais sa voix n’était qu’un misérable filet de voix bafouillant. C… Cette chose… ce n’était pas Bendy ! Cette créature, ce ne pouvait pas être son frère !
Le monstre se détourna de lui dans une volte face. Sans plus lui accorder la moindre attention, il s’élança vers le champ de bataille où luttaient Félix et Mugman côte à côte. Alors que le benjamin de Cuphead balançait une nouvelle salve, l’écrivain fit sauter son arme dans sa main, prêt à repartir à l’assaut. Cependant, il fut interrompu dans son mouvement d’attaquepar une silhouette inconnue qui passa en coup de vent près de lui. Le nouvel arrivant se propulsa dans les airs d’une prodigieuse détente sous le regard stupéfait de l’ensemble des combattants.


Sa queue immense s’enroula autour du bras blessé de la sirène alors qu’il atterrissait dans le creux de son coude en grognant tel un animal enragé. Son ennemie, appréciant peu qu’un insecte ne lui grimpe dessus, leva sa main valide avec la ferme attention de l’écraser. C’était sans compter sur l’agilité de son adversaire. Ce dernier, d’un nouveau bond, se projeta sur l’épaule de la créature aquatique pour lui griffer le visage. La gueule de la sirène s’ouvrit largement pour laisser sortir un hurlement de fureur. Sans perdre un seul instant, le combattant poursuivit son assaut en mordant à pleins crocs le tentacule qui essayait de le déloger de son perchoir. Puis il descendit à quatre pattes sur le bras où il avait initialement débuté son ascension. Sa queue, affreux serpent animé d’une volonté propre, vint ceinturer le moignon de la sirène. Puis elle se contracta pour étreindre la chair jusqu’à la rupture.
Les fragments de sirène churent et éclatèrent la surface de l’eau. Le combattant dut effectuer de nouveau un de ses bonds prodigieux dont il avait le secret pour éviter de sombrer avec les membres épars de son adversaire. Il se ramassa sur lui-même puis se jeta en avant. Il parvint à atteindre le rivage, à quelques pas seulement de Félix qui dardait sur lui un regard éberlué. L’écrivain s’apprêtait à lui demander de décliner son identité quand le mystérieux nouveau venu se redressa. C’est alors qu’il comprit.
Il s’agissait de Bendy.


Il avait certainement doublé de taille. Ses membres, plus musclés, étaient rehaussés de redoutables ergots et de griffes. Entre ses crocs aiguisés sinuaient des filets épais d’encre. Sa peau toute entière, d’ailleurs, luisait, recouverte de cette même substance visqueuse qui semblait l’envelopper comme un costume. Et ses yeux… L’écrivain n’en avait jamais vu de pareils, plus sombres qu’une nuit sans lune, plus impénétrables qu’un puit sans fond.
Mugman et Cuphead, eux aussi, avaient identifié leur allié. L’aîné, les yeux écarquillés, ne parvenait pas à prononcer une seule parole, estomaqué par la vision de ce Bendy somme toute terrifiant. Néanmoins, son frère n’était pas d’accord, bien au contraire.
-       C’est tellement cool ! s’exclama-t-il.


Avant que son aîné n’ait pu le retenir, Mugman s’était avancé, le regard étincelant d’admiration.
-       Je ne savais pas que tu pouvais faire ça, confessa le jeune ingénu.
Le mécanicien se tourna vers lui. Son regard noir, dépourvu d’émotions, se posa sur le visage de son interlocuteur, comme s’il ne le reconnaissait pas.


Mugman, sous l’intensité de ces yeux semblables à deux gouffres, ne put s’empêcher d’avoir un mouvement de recul. Il tenta une plaisanterie pour détendre l’atmosphère soudainement chargée d’une tension sans précédent :
-       Bon sang, tu as un look un peu… effrayant.
L’instinct de grand frère de Cuphead ne fit qu’un tour. Il s’interposa entre Bendy et son benjamin, le bras tendu pour empêcher le malade de s’approcher de lui. De son autre main, il tenait fermement Jackpot contre sa poitrine. Jamais il ne se serait douté que Bendy était capable d’un tel prodige. Un rapide coup d’œil lui indiqua que Boris non plus ne semblait pas en revenir. Il ignorait ce qu’il s’était passé et, surtout, les conséquences de cette violente transformation. Nul ne savait si le mécanicien ne s’était pas fait engloutir…
-       B… Bendy ! l’interpella-t-il, maudissant intérieurement sa langue qui avait fourché. C’est vraiment toi ?
Pour toute réponse, la patte hérissée de terribles griffes s’avança vers lui. Cuphead sentit l’ensemble des muscles de son corps se tendre. Il ferma instinctivement les yeux, attendant l’affreuse brûlure des ongles aiguisés dans sa chair. Que ne fut pas sa surprise quand les doigts du mécanicien se perdirent dans sa chevelure. Avec un plaisir évident, le malade défit la chevelure élastique de son ami en passant énergiquement sa paume dedans.
-       Oh, regarde qui est en bas.
La voix, grave, presque rocailleuse, était bel et bien sortie de la gorge de Bendy, même si elle n’avait rien à voir avec celle que l’intéressé utilisait en temps normal.
-       Je suppose que cela explique ta tendance à l’emportement, enchaîna le malade. Tu n’as qu’une petite patience ! Ça fait écho à ta petite taille !
Sur ce trait d’esprit qu’il trouvait particulièrement hilarant, Bendy éclata de rire, les poings vissés sur les hanches. 



Consterné par son attitude, Cuphead ne trouva rien à répondre, contrairement à Mugman qui se joignit son ami dans sa crise d’hilarité. Il semblerait donc que Bendy ait conservé l’entièreté de sa raison ! Un soupir de soulagement franchit discrètement le seuil de ses lèvres. Au moins, ils n’avaient pas deux fronts à mener à la fois !
Le mécanicien contemplait ses paumes gigantesques, un sourire béat sur le visage. Il passa le revers de sa manche sur ses yeux pour essuyer l’encre qui obstruait sa vision.
-       J’espère que c’est réel, murmura-t-il dans un souffle.
Cuphead eut un violent sursaut quand ce chuchotement, pourtant infime, lui parvint. Il aurait souhaité demander de plus amples explications au mécanicien, mais il n’en eut pas le temps. En effet, ce dernier s’avançait déjà vers son adversaire tout en faisant craquer ses jointures, une expression carnassière gravée sur ses traits. Il pouvait se battre… Il allait se battre ! Il allait écraser cette fichue sirène ! En cet instant, rien n’aurait pu le rendre plus heureux. Il allait être utile à monsieur Félix, à son frère, à ses amis !
-       Désolé, mesdames, lança-t-il par-dessus son épaule, mordant. J’aurais adoré rester et discuter, mais je dois montrer à cette salope qui est le patron, ici. 



Et, sans ajouter un mot de plus ou ne serait-ce accorder une œillade à ses compagnons, Bendy se lança de nouveau dans son duel mortel avec la sirène.

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