mardi 26 février 2013

CHAPITRE 3

   Coucou, tout le monde !
   Désolée pour cette longue absence, j'en suis désolée, mais, en ce moment, je suis à fond sur l'écriture d'un bouquin, je n'ai pas du tout pensé à entretenir le blog… Honte à moi !
   Pour compenser, je vous mets ici le chapitre 3 de la fiction. En espérant que cela vous plaise toujours, évidemment !
   Ah, oui, je voulais vous dire : n'hésitez pas à laisser des commentaires sur le blog pour me donner votre avis, faire des remarques ou poser des questions. Je serai ravie de vous répondre (enfin, dans la mesure du possible, tout de même !). Le blog est un lieu d'échange et de partage, alors n'hésitez pas !




-       T’as encore pété un câble ou quoi ?
Wait jeta un regard assassin à son serviteur tandis que celui-ci se penchait pour ramasser des éclats de verre, souvenir d’un vase.
-       Tu ne m’avais pas parlé de Lizzie, cracha le Comte. C’est qui, cette pouffe ?
-       Surveille ton langage en sa présence, conseilla Gilles d’un ton sec. La duchesse de Nemurine est une personne à qui tu dois le respect, Wait.
-       Rien à faire, marmonna celui-ci.
-       C’est toi qui a tenu à ce qu’on soit dans cette situation. À toi d’en assumer les conséquences.
-       La ferme, sale clébard, ou je te fais arracher l’autre œil.
-       Comme ça je ne verrai plus ta sale tête, répliqua le domestique du tac ou tac.
Un violent coup de pied dans les côtes l’envoya valdinguer contre un mur. Les morceaux de verre lui échappèrent et se fichèrent dans le parquet ciré. Le Comte en ramassa un et le brandit sous l’œil valide de son domestique.
-       On peut arranger ça maintenant, cracha-t-il.
-       Tu as besoin de moi. Tu ne le feras pas.
-       Je peux toujours m’en prendre à ta chère famille.
-       Tu m’avais promis que tu ne leur ferais pas de mal !
-       J’ai dit ça, moi ? Ah bon ?
-       Oui, répondit Gilles dans un souffle, ne quittant pas du regard l’éclat de verre à un centimètre à peine de son œil.
-       Tu peux rêver, mon cher Gilles. Tant que tu ne seras pas complètement soumis, je m’en prendrai à tout ce que tu tiens !
-       Tu m’as déjà tout pris !
-       Comme ceci ? ironisa le Comte. 
Il sortit de sous sa chemise un médaillon relié à une longue chaîne. C’était un pendentif en forme d’étoile à huit branches. Chacune des branches était frappée par une lettre minuscule de l’alphabet grec ancien : deux alpha, un kappa, un mu, un nu, un lambda, un rho et un sigma. Le centre était composé de plusieurs cercles concentriques, disposés les uns sur les autres. Eux-mêmes étaient découpés en plusieurs arc de cercles, comme les pétales d’une rose en plein épanouissement.
-       Le plus précieux des trésors de ta famille, non ? sourit Wait en voyant la flamme de colère s’allumer dans l’œil de son domestique. Hein, le roturier ?
-       … 
-       J’adore ce médaillon, avoua Wait. Il faisait parti d’un trésor pirate, non ?
-       … 
-       Et si je te crevai l’œil avec ? Ce serait une sacrée ironie, non ?
-       Wait ! appela une voix. Le déjeuner est servi. Ta fiancée t’attend.
Dans l’encadrement de la porte se tenait la jeune femme aux cheveux coupés en carré court. Le Comte se releva en bâillant :
-       Pas trop tôt, grogna-t-il. J’avais faim, moi. Gilles, qu’est-ce que tu attends ? Va chercher la fiancée et amène-la à la salle à manger ! Tu t’attends à ce que ce soit moi qui le fasse ou quoi ?
-       Vous devriez, répliqua Gilles d’une voix tremblante. Vous êtes son fiancé : à vous de vous occuper d’elle.
-       Pff… Bon je vais envoyer Toboré la chercher. Charge t’en, Gilles.
-       Je t’ai déjà dit que je ne m’approcherai jamais d’un de tes chiens de garde, cracha le jeune garçon en guise de réponse.
-       Fais ce que je te dis ou je rend une petite visite surprise aux jumeaux.
Gilles se raidit. Il jeta un regard assassin à son Maître puis sortit du bureau en trombe.
Dans l’ombre, Sanal s’empressa de retourner aux cuisines.

Un jeune homme pénétra dans sa suite sans même frapper à la porte. Lizzie, qui s’était assise dans un canapé, se releva en hâte. Elle ne l’avait pas encore vu… Ah si ! Ce matin, dans la chambre de son fiancé. C’était un individu sec aux cheveux longs jusqu’aux épaules. Il lui servit le même sourire éméché que celui plus tôt dans la matinée.  
-       Wait t'attend, indiqua-t-il avec une voix mielleuse. 
Lizzie ne prit même pas la peine de répondre. Elle releva le menton, l’air hautaine. On l’avait laissée seule dans cette pièce pendant près d’une heure. Pendant près d’une heure, elle avait cru entendre des cris de détresse et de rage. Elle avait cru sentir la chaleur des flammes sur son visage, cru voir des visages en pleurs, cru percevoir des coups de feu se perdre au loin. Les émotions semblaient avoir été jetées en vrac sur le sol et elle avait mis les pieds en plein dedans. Il lui semblait qu’elles s’accrochaient à elle pour pénétrer sa peau, déverser leur essence à même son organisme. Tout était si violent qu’elle aurait aimé s’enfuir en courant.
Pourtant, c’est d’un pas tranquille qu’elle emboîta le pas de son guide. Elle cacha sa peur sous un masque marmoréen et battit plusieurs fois des cils pour disperser les dernières traces de larmes dans ses yeux.
Ils allaient vers l’aile Est du manoir qui, elle, avait été récemment reconstruite, en déduisit Lizzie en arrivant dans la salle à manger. Elle en eut le souffle coupé. Même dans le manoir Nemurine, il n’existait pas de pièce égale à celle-ci ! Le plafond était orné de peintures et de lustres en cristal : le moindre rayon de soleil s’y accrochait pour ricocher dans toute la salle. Les fenêtres étaient composées de vitraux dont les couleurs miroitantes éclaboussaient le sol. 
-       C’est magnifique, murmura la jeune fille.
Un toussotement la fit sursauter. Wait, debout près de la table, l’attendait avec une impatience non dissimulée. Gilles, posté près de lui, lui glissa quelques mots à l’oreille, mais son maître le repoussa d’un geste de mauvaise humeur. Lizzie se tira un siège et s’assit. Wait se mit à table à son tour, suivi de Lena, Rima et son guide. Gilles disparut un cours instant pour revenir en poussant devant lui un chariot à roulettes. Ce dernier croulaient sous les plats au fumet appétissant. Holly, au seuil de la salle à manger, suivait l’évolution de son frère du coin de l’œil.
-       Civet de lapin, accompagné de riz cuit dans du thé noir et carotte vapeur à la crème, énonça Gilles en déposant une assiette fumante devant Lizzie.
Elle le remercia d’un sourire puis attendit que les autres soient servis. Sanal vint servir le vin et Wait leva son verre.
-       À nos fiançailles, ma chère Elizabeth.
Lizzie leva sa coupe par pure politesse. Elle n’avait aucune envie de se fiancer à cet homme qu’elle trouvait sincèrement méprisable. Mais la curiosité finit par prendre le dessus sur son dégoût.
-       Dîtes-moi, Wait, minauda-t-elle. Je voudrai savoir… Qui sont ces personnes qui partagent notre repas ? Vous ne me les avez pas présentés en bonne et du forme.
-       Ouais, ouais… Elle, c’est Léna, tout d’abord.
Il désigna la jeune femme aux cheveux courts qui ne daigna même pas lever les yeux sur Lizzie.
-     C’est mon bras droit, expliqua Wait. Ensuite, Rima que tu connais. Une femme qui lit à merveille, n’est-ce pas, Gilles ?
Le domestique lui jeta un regard noir.
-     Et enfin, reprit le Comte, Toboré. Un bon élément, mais un peu idiot sur les bords.
-     Pas que sur les bords, ricana Léna.
L’intéressé voulut répliquer, mais une œillade incendiaire de son chef l’en dissuada. Lizzie haussa un sourcil, mais ne pipa mot. Un bruit de casse attira Gilles en cuisine, laissant derrière lui un lourd silence médisant. Lizzie s’attaqua à son assiette qu’elle trouva délicieuse. Laissant de côté toutes les questions qui la taraudaient, elle dévora avec enthousiasme. Rima esquissa un sourire mais ne toucha à rien, même pas à son verre de vin. Aucun ne parla durant le repas.
Gilles apporta le dessert, composé de tartelettes à la framboise et d’un thé ambré. Lizzie grimaça : encore cette boisson de vieux… Pourquoi est-ce qu’elle devait toujours en boire ! Elle en prit une gorgée par politesse puis reposa la tasse. Elle préférait nettement les chocolats chauds ! Par contre, en grande gourmande qu’elle était, elle ne laissa pas une miette de sa tartelette.
-       Mr le Comte, pourquoi ne pas emmener votre fiancée près du lac cet après-midi ? suggéra Gilles. Je me chargerai d’annuler vos rendez-vous.
-       J’avais des rendez-vous ? s’étonna Wait.
Gilles ne préféra rien répondre et commença à débarrasser la table. Wait faillit le rappeler à l’ordre, mais se ravisa en croisant le regard de Lizzie. Cette dernière lui offrit un délicieux sourire. C’était le moment de lui soutirer les informations qu’elle n’avait pu obtenir de Gilles.
-       Cela me ferait très plaisir, assura-t-elle. Et si nous y allions maintenant ?
-       Bien… Rima, Toboré, vous restez au manoir. Lena, tu viens avec nous.
-       Sanal, tu restes ici.
-       Bien, M’amzelle.
-       Miladie, reprit Wait en tendant la main vers Lizzie.
Avant de sortir, le Comte jeta un regard noir à son domestique qui, pour toute réponse, lui fit un petit signe de main en guise d’au revoir. Une fois les trois promeneurs sortis de son champ de vision, un air las s’inscrivit sur son visage.
-       Quelle plaie, grommela-t-il. Il me reste encore beaucoup de boulot.
-       Laisse-moi t’assister ! proposa Rima.
-       Je dois avouer que ton aide serait la bienvenue.
Rima se figea. Elle avait du mal que Gilles ait cédé aussi facilement. Lui qui d’habitude lui refusait tout systématiquement… 
-       J’espérai que les parents de Lizzie m’auraient accordé plus de temps… A croire qu’ils ont hâte de se débarrasser de leur fille. Quoiqu’il en soit, nous n’avons plus qu’un moi pour retaper entièrement le manoir. La moitié de l’aile Ouest tombe en ruines, le hall, la façade et le jardin ont besoin qu’on s’occupe d’eux en urgence. Si ont veut que le mariage ait lieu comme prévu, tout doit être dans un état irréprochable.
-       Gilles… Tu as conscience que Wait ne voudra jamais épouser cette Elizabeth ?
-       Il le faudra bien s’il veut que son plan fonctionne.
Il déroula un plan du manoir pour s’y pencher. Appuyée sur la chambranle de la porte, Rima le détaillait. Comment un enfant de son âgé pouvait être aussi sérieux ? S’en était presque fou !
-       Gilles… commença-t-elle.
-       Quoi ?
-       Tu sais… On… Je m’en veux et je… 
-       … 
-       J’ai toujours été sincère avec toi.
-       Bien sûr, ricana-t-il, amer. Tu t’es joué de moi, tu m’as dupé, tu as tué des personnes qui comptait à mes yeux, détruit la vie de ma famille… A part ça, tout va bien !… Ça m’apprendra à être aussi naïf !
-       Gilles… 
-       Bon, voyons ce qu’on a aujourd’hui ! Il faudrait nettoyer la façade !
-       ‘Peux aider ! proposa Sanal en montrant ses biceps. Chez Numerine, nous twès forts !
-       Merci Sanal… Rima, va chercher Toboré et trouve un moyen de le dégriser parce qu’il doit déjà être pompette là.
-       J’y vais.
-       Bien… Au travail.

Wait, Léna et Lizzie marchaient le long d’un petit sentier. Cette dernière se demandait de quelle manière elle pourrit tirer les vers du nez du Comte.
-       C’est vraiment dommage que le manoir soit dans cet état, soupira-t-elle d’un ton faussement désolé. On me l’avait dit si magnifique !
-       Si tu l’dis.
-       Comment ça ?
-       Je ne l’ai jamais vu, répliqua Wait en haussant les épaules.
“Trop facile !” jubila Lizzie.
C’est alors qu’intervint Léna :
-       Bien sûr que si, Wait. Tes troubles de mémoire sont de plus en plus fréquents, décidément.
-       Troubles de mémoire ? répéta Lizzie, incrédule.
-       Wait a vite été éloigné de sa famille à cause de tentatives d’assassinats répétées. Il ne garde que peu de souvenirs du manoir, souvenirs brouillés par des pertes de mémoire. Quand Wait a réintégré le manoir, ce dernier avait déjà été sujet aux flammes.
“Sa version correspond à celle de Gilles, pesta Lizzie. Mais je suis sûre qu’ils me mentent !”
-       Et vos parents, les Seigneurs Phamvarna ? demanda-t-elle poliment.
Un mauvais rictus contracta le visage de Wait alors qu’un sourire carnassier étirait ses lèvres.
-       Eux, ils ne sont pas près de me déranger de sitôt !
-       Que voulez-vous dire ?
Ils étaient arrivés près d’un lac ceinturé de roseaux. Léna étendit une nappe et les fiancés s’y installèrent. Wait défit le ruban noué autour du col de sa chemise et détacha ses cheveux flamboyants. Il sortit de son col un médaillon en forme d’étoile et sourit.
-       On dit qu’un jour, suite à une guerre sans merci, un homme est resté aux portes de la mort pendant près de trois mois. S’il est revenu à la vie, c’est grâce à ce médaillon, parce que ce bijou à repousser le Dieu de la Mort… Fascinant, non ?
-       Et assurément faux, renifla Lizzie, très terre à terre.
-       Vous croyez ?
-       Vous n’avez pas répondu à ma question. 
-       Les Phamvarna ? Ah… Disparus.
-       Disparus ?
-       Oui, mais ils seront là à temps.
-       À temps pour quoi ?
Il lui offrit un sourire de loup (décidément, c’était sa spécialité !)
-    À temps pour le spectacle, ma chère 





Marine Lafontaine

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